De quoi ça parle ?
Au lendemain de la révolution russe, le comte Alexandre Rostov découvre que son statut de privilégié le place du mauvais côté de l'histoire. Même s’il échappe à une exécution immédiate, un tribunal soviétique le condamne à vivre retranché dans une chambre dans les combles du luxueux hôtel Metropol et le menace de mort si jamais il en sortait. Tandis que les années passent et que le pays traverse les décennies parmi les plus tumultueuses de son histoire, les conditions de vie restreintes de Rostov l’ouvrent sur un vaste monde de découverte émotionnelle. Alors qu'il se construit une nouvelle vie entre les murs de l'hôtel, il découvre la véritable valeur de l'amitié, de la famille et de l'amour.
D’après le roman "Un Gentleman à Moscou", d’Amor Towles.
A Gentleman in Moscow, une série créée par Ben Vanstone avec Ewan McGregor, Mary Elizabeth Winstead, Paul Ready...
Le luxe comme prison
Il y a pire comme lieu pour être assigné à résidence que dans un hôtel opulent. Bien sûr, ce cadre luxueux devient une prison quand vous êtes relégué dans une chambre lugubre et froide sous les toits avec à peine un petit lit, très peu de chauffage et la menace d'être abattu à vue si vous osez franchir les portes dorées de l’hôtel.
Adapté du roman d'Amor Towles de 2016, qui s’est vendu à plus de quatre millions d'exemplaires, A Gentleman in Moscow est un drame historique chic se déroulant dans la Russie post-révolutionnaire, centré sur un aristocrate déchu, en décalage avec l'histoire qui s'écrit autour de lui.
Le Comte Rostov (Ewan McGregor) est un noble qui rentre chez lui en Russie après la Révolution bolchevique. Son espèce est en voie de disparition et il a de la chance de sauver sa tête lors d'un procès expéditif qui l'accuse d'être né riche.
Sauvé de la mort mais dépossédé de ses biens, de sa richesse et de ses titres, Rostov est condamné à l'assignation à résidence à l'hôtel Metropol, un établissement grandiose où il est censé vivre le reste de sa vie. Là, il est transféré de sa suite somptueuse à une chambre réservée autrefois aux serviteurs.
Mais avec la promesse du gîte et du couvert — et de sa vie — Rostov supporte bien ses circonstances réduites. Il continue de s'habiller pour les repas dans les salles de restaurant de l'hôtel, servi par le personnel avec qui il tisse des liens et engage des conversations spirituelles.
S'accrocher à l'humain
Il rencontre aussi Nina (Alexa Goodall), une fillette de neuf ans pleine d'esprit qui désire qu’on lui raconte des histoires de princesses dans un monde où elles sont tuées en pleine nuit. Et Anna Urbanova (Mary Elizabeth Winstead), une actrice dont les perspectives de carrière sont désormais incertaines dans le nouvel ordre social, devient sa compagne intermittente, lorsqu'elle passe à l'hôtel.
McGregor et Winstead, sont mari et femme dans la vie réelle — A Gentleman in Moscow est leur troisième collaboration à l'écran — et leur alchimie ludique et intense est l'un des points forts de la série. On a envie de voir ces deux personnages liés, deux âmes solitaires ensemble.
Rostov approfondit également sa relation avec Mishka (Fehinti Balogun), un révolutionnaire qu’il connaissait avant, et doit accepter comment leurs passés s'entremêlent dans le présent.
Il y a de grands bouleversements au-delà des murs du Metropol, qui infiltrent petit à petit ses frontières. Même un grand hôtel ne peut rester le même éternellement lorsque l'histoire avance, et Rostov non plus, malgré ses efforts.
Un cauchemar russe
Il tente de conserver sa civilité et ses manières, les derniers vestiges d'une vie qui n'existe plus dans un pays qui souhaiterait qu'il n'existe pas. Mais on ne peut contrôler tant de choses et cette façade imperturbable glisse de temps en temps, comme lorsque Rostov est confronté à la cruelle réalité que d'anciennes connaissances ont trop peur ou sont trop mortes pour assister à un service commémoratif qu'il organise.
La série, adaptée par Ben Vanstone et réalisée par Sam Miller et Sarah O’Gorman, se délecte des détails du confinement imposé par une politique brutale et absurde. Quelque chose d’aussi anodin que les étiquettes de vin deviennent politiquement significatives.
La politique et la peur ne sont jamais loin. La série rappelle subtilement et parfois de manière moins subtile les promesses de la révolution et les abus inévitables qui découlent d'un régime autoritaire. Des regards en coin, les ajustements forcés à l'intérieur de l'hôtel, la présence d'agents gouvernementaux donnent à la série une atmosphère doucement menaçante.
Se déroulant sur plusieurs décennies, la série fait vieillir ses personnages, un défi que McGregor relève avec aisance. Il y a de la grâce dans sa performance et il y a de l'élégance - peut-être un peu trop ? - dans A Gentleman in Moscow. C'est une série qui invite à penser le monde, à rester immobile un petit moment avant que tout change, encore.
Les deux premiers épisodes de A Gentleman in Moscow sont diffusés dès ce jeudi à 21h10 sur Canal+ et disponibles sur MyCanal.